Le crowdfunding est un marché nouveau et pourtant il risque déjà d’être disrupté grâce à une « nouvelle technologie » appelée Blockchain. Cet article intervient à la suite de l’évènement bl0ckcha1n organisé par le magazine Finyear pour lequel j’ai eu la chance d’être speaker en compagnie de Sébastien Couture de Stratumn.
Qu’est ce que la blockchain ?
D’après la définition Wikipedia, la chaîne de blocs (en anglais : blockchain) est une base de données distribuée qui gère une liste d’enregistrements protégés contre la falsification ou la modification par les nœuds de stockage. À proprement parler, une blockchain est un historique décentralisé des transactions effectuées depuis le démarrage du système réparti.
On confond souvent Bitcoin et Blockchain. Cette confusion provient du fait que le bitcoin est une crypto-monnaie basée sur la technologie Bockchain et que c’est sûrement l’application la plus connue qui en est faite.
Pourtant cette technologie décentralisée et sécurisée peut avoir bien d’autres utilisations notamment avec les « smart contracts » ou « contrats intelligents ». Ces derniers permettent notamment d’automatiser la signature mais aussi l’exécution d’un contrat si certaines conditions ont été respectées.
Cette technologie, de part son principe, permet de supprimer les intermédiaires et de réduire les coûts de transaction.
De nombreuses initiatives sont en cours dans ce domaine. Par exemple plus d’une vingtaine de banques internationales se sont associées autour du projet R3 afin de faciliter l’utilisation de la blockchain sur les marchés financiers. D’autres banques ont aussi annoncé vouloir lancer leur propre crypto-monnaie grâce à la technologie Blockchain, …
Quel peut être l’impact de la blockchain sur le crowdfunding ?
Si j’étais jusqu’au-boutiste , je dirais que la technologie blockchain pourrait faire disparaitre complètement les plateformes de crowdfunding. Bien sûr encore faut il que cette technologie soit adoptée par le plus grand nombre et qu’elle soit moins coûteuse (même si ça semble être le cas). Avant de voir comment le crowdfunding pourrait être disrupté, il convient de rappeler le fonctionnement des plateformes « traditionnelles ».
Fonctionnement des plateformes actuelles
Une plateforme de crowdfunding « traditionnelle » doit être capable d’assurer au moins 3 missions :
- Servir de tiers de confiance, c’est à dire proposer suffisamment de projets pour permettre aux investisseurs / prêteurs de diversifier leur portefeuille tout en ne gardant que les bons dossiers afin de limiter le risque de défaillance
- Assurer la visibilité des projets en proposant des outils marketing aux porteurs de projets
- Appliquer des règles métiers permettant de sécuriser les flux financiers, la gestion des flux financiers étant assurée par un tiers (LemonWay, S-Money, Ingenico, …)
Ainsi ce mode de fonctionnement implique des frais associés à l’utilisation de la plateforme (3 à 5 % du financement) et un risque de censure du fait de l’analyse et de la validation du projet par la plateforme.
Par ailleurs le marché du crowdfunding en général manque de liquidité. En effet le contrat de prêt ne peut être cédé à un tiers et très peu de sorties ont été réalisées jusqu’à présent en equity, les investisseurs restant donc bloqués au capital pendant 5, 7 ans ou encore … éternellement !
Et dans le futur !
Tout d’abord, comme dit plus haut, la technologie blockchain permet d’éliminer les intermédiaires, la plateforme assurant les services de paiement en faisant donc partie.
Ainsi on peut imaginer que les investisseurs ou prêteurs envoient directement l’argent au porteur de projet de façon sécurisée par l’intermédiaire de la blockchain, notamment en utilisant une crypto-monnaie, bitcoin ou autre.
Ensuite, en utilisant les smart contracts, toujours par la blockchain, on peut imaginer réaliser les « contrats de prêt » (crowdlending) mais aussi numériser les bons de souscriptions (equity) et ainsi en faire des actifs digitaux sécurisés (digital assets).
En bonus, ces actifs digitalisés par l’intermédiaire de la blockchain deviennent facilement transférables à un tiers, de manière sécurisée et à un coût négligeable … on crée ainsi les marchés secondaires qui n’existent pas aujourd’hui …
On a donc déjà supprimé 2 des 3 missions d’une plateforme de financement participatif, la 3ème étant la partie marketing. Sur ce point je me demande vraiment si les plateformes servent à quelque chose (je ne parle pas du crowdlending) et si elles ont vraiment une communauté active … Personnellement je n’y crois pas car je viens d’en vivre l’expérience sur une plateforme connue. Et je ne suis pas le seul à le penser puisque :
- il existe des initiatives (Tilt par exemple) permettant de créer une campagne de crowdfunding sur son propre site ou par soi-même.
- il est écrit partout sur le web que réussir une campagne est compliqué et qu’il faut faire participer sa propre communauté… alors à quoi sert la plateforme ? 😉
En conclusion, la blockchain permet de :
- gérer les paiements entre les backers / prêteurs / investisseurs et les porteurs de projet
- gérer les titres de propriété, les créances grâce aux smart contracts
Et les réseaux sociaux (facebook, twitter, …) permettent de réaliser la partie marketing !
Autrement dit les plateformes auront disparu dans quelques années 😉
Vous n’y croyez pas ? alors en voici des exemples 😉
Voici quelques exemples du crowdfunding utilisant la technologie blockchain et pourtant nous ne sommes pas exhaustifs
Bitbond : Le crowdlending en bitcoins
Bitbond est une plateforme de prêt en bitcoin. Par cet intermédiaire, la plateforme ne subit aucune frontière et les emprunteurs et les prêteurs viennent du monde entier.
Chroma.fund : l’investissement grâce au bitcoin et à la blockchain
Chroma.fund est une plateforme qui permet aux startups à la recherche de fonds d’émetttre des chroma.coin (une fraction de bitcoin) leur permettant de ne pas offrir du capital aux investisseurs mais une part de leurs revenus futurs.
Par ailleurs par l’intermédiaire des smart contracts, la rémunération future est conditionnée à un certain seuil de bénéfices. Une fois le bénéfice réalisé, les revenus sont automatiquement distribués aux investisseurs.
Ethereum : 21 M$ levé en crowdfunding … sans plateforme
Ethereum est un logiciel permettant de créer des applications basées sur la blockchain. L’organisation a réussi à collecter, grâce à une campagne de crowdfunding, 21 millions de € en 2014 par elle-même, autrement dit sans l’aide d’une plateforme de crowdfunding.
Merci à Sébastien pour avoir apporté son expertise dans le domaine de la blockchain.
Vous être d’accord, vous n’êtes pas d’accord, il suffit de vous exprimer ci-dessous 😉
4 réponses à “La blockchain va révolutionner le crowdfunding (déjà !)”
Charles
Article plein de vérités.Merci pour vos informations éclairées
Nous cherchons différents acteurs qui utilise la technologie BLOCKCHAIN afin de constituer un consortium dans lequel nous pouvons apporter nos expertises sur les différents métiers qui aujourd’hui s’approprient les données produites par tout à chacun et les exploitent aux détriment de ceux en sont à ‘origine.
« Celui qui détient l’information détient le pouvoir, »
« Si j’ai une information sur vous vous l’avez aussi et vous vous en faîte ce qui a du sens pour vous »
Nous travaillons sur une plateforme tiers de confiance interface utilisateur véritable outil d’aide à la décision et de gestion de projets qui permet de rééquilibrer la chaîne de valeurs dans les échanges. (Ecosolidacollabo
Economie solidaire et collaborative)
Therese Torris
Bonjour Mathieu. Le concept de la blockchain est très prometteur et fascinant, mais la réalité de sa mise en oeuvre est loin d’être évidente. La version la plus sûre et décentralisée, celle du bitcoin, ne semble pas économiquement viable et les versions plus économiquement viables comme par exemple celles qui proposent de remplacer le « proof of work » par le « proof of stake », semblent moins sûres. Bref, je trouve qu’il faut garder un peu de scepticisme par rapport à la vague de hype qui saisit collectivement le monde de la finance et se rappeler la hype des débuts du bitcoin. C’est ce que j’ai voulu exprimer dans cet article qui m’a valu l’ire de certains fans de la blockchain 😉
http://www.crowdfundinsider.com/2015/12/78702-busting-7-blockchain-bitcoin-myths/
Leo
Interessant. Le blockchain peut eliminer les plateformes de dons, peut-etre.
Mais pour ce qui est de l’equity et du lending, le blockchain n’apporte aucune garantie quant a ce que vous appelez l’application des regles metiers. Je ne vois pas (encore) comment une techno peut se substituer a une evaluation humaine, Et c’est cette expertise que vendent les plateforme d’equity et de lending. Le marketing d’un projet en don ou en pret ou en equity est fondamentalement different, et surtout, obeit a des contraintes legales differentes.
Sauf a investir en bitcoin (mais je ne crois pas a la diffusion massive du bitcoin), il y a aussi un probleme evident de compliance, qui est assure par les plateformes.
Charles-Antoine
dans le cas du financement d’une société, tout ceci bute sur un contresens majeur. Créer une société, la faire vivre c’est créer un « être social » particulier distinct, dans sa personnalités et ses responsabilités, de ses propriétaires. La publicité (au sens de rendre public) est consubstantiel à la naissance et à l’existence d’une société… le peer to peer semble un inutile détour pour un résultat qui doit nécessairement être largemetn publié.